
Reportage France - Paroles de soignants
RFI
Du lundi au vendredi, un reportage pour mieux connaître la société française et comprendre ses débats.
Location:
Paris, France
Genres:
World News
Networks:
RFI
Description:
Du lundi au vendredi, un reportage pour mieux connaître la société française et comprendre ses débats.
Language:
French
Website:
http://www.rfi.fr/
Episodes
Champigny-sur-Marne: la baignade dans la Marne à nouveau autorisée
7/3/2025
ENFIN diront ce samedi certains parisiens et touristes ! À partir du 5 juillet, il sera possible de se baigner dans la Seine. Une promesse héritée des Jeux olympiques de Paris 2024, qui bénéficiera aussi à la Marne, la rivière la plus longue de France, après plus d'un demi-siècle d'interdiction. Une zone de baignade aménagée et sécurisé au niveau de la Ville de Champigny-sur-Marne qui abrite aussi une base nautique. Comme pour la Seine, la qualité de l'eau y est et y sera régulièrement contrôlée.
À quelques jours du lancement de la nouvelle baignade, et à l'occasion d’une opération de nettoyage de la Marne, Arame Mbengue s'est rendue sur le site.
Duration:00:02:30
Dans les Vosges, une usine donne une deuxième vie aux briques alimentaires
7/2/2025
Dans les montagnes des Vosges, berceau de l'industrie du papier dans le nord-est de la France, une usine du groupe italien Lucart SAS met en avant sa production de papier toilette et d'essuie-tout, fabriqués grâce au recyclage de briques alimentaires. Une façon de redorer le blason d'une industrie connue pour son impact environnemental sur l'eau, l’air ou encore en termes d'émissions carbone. Reportage à Laval-sur-Vologne.
À quelques pas de la rivière qui a donné son nom à cette vallée des Vosges où le premier moulin à papier remonte au XVI siècle, de grandes balles de briques alimentaires comprimées, de plusieurs centaines de kilos chacune, s'alignent à l'extérieur de l'usine Lucart SAS.
Ce sont des briques de lait, de soupe ou de jus de fruit qui ont été consommées puis jetées par les Français dans le bac à tri, et qui servent de matière première à l'entreprise. Chaque année, l'usine de Laval-sur-Vologne en recycle « entre 35 000 et 40 000 tonnes », indique Pascal Jacquemin, responsable technique.
« Il y a trois matériaux dans la brique alimentaire, détaille Benoît Cottel, le directeur général de Lucart SAS. D'abord, on a de la fibre de cellulose, c'est-à-dire du papier aux alentours de 70%. Puis, on va trouver un film plastique – du polyéthylène –, et enfin, un film aluminium. Notre savoir-faire chez Lucart, c'est qu'on sait séparer ces couches. »
Comment se déroule cette séparation des différentes matières afin de procéder à leur recyclage ? Nous n'aurons pas beaucoup de détails, secret industriel oblige. « Ce qu'on peut dire, c'est qu'il y a des actions par l'eau, des actions mécaniques et des actions thermiques qui vont nous permettre de séparer la fibre de cellulose du polyéthylène et de l'aluminium qui vont rester ensemble », explique tout de même Benoît Cottel.
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Une bobine de papier de presque 50 kilomètres
Nous entrons alors dans la partie de l'usine où la fibre de cellulose est transformée. L'atmosphère est humide et le bruit des machines assourdissant. « Ce qu'on entend, ce sont les moteurs, les roulements mécaniques, c'est la pâte qui tourne dans les pulpeurs et les convoyeurs qui acheminent la matière jusque dans les pulpeurs », décrit le directeur général.
Quand ces gros mixeurs ont fini de préparer la pâte à papier, celle-ci est chauffée pour être nettoyée. « Et la dernière étape, ce sont les deux machines à papier, indique Pascal Jacquemin, responsable de la fabrication. On égoutte la pâte à papier, ensuite on la presse, on l'essore, puis on la sèche. Ensuite, on va produire une feuille conforme aux caractéristiques demandées par le client, en épaisseur, en grammage. » Depuis la salle de contrôle vitrée, les opérateurs surveillent les paramètres des deux machines à papier 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.
Enfin, en bout de chaîne dans un troisième bâtiment, des robots transforment cette énorme bobine de papier de presque 50 kilomètres et de plusieurs tonnes, en petits paquets d'essuie-mains. « On découpe la bobine, on la gaufre, c'est-à-dire qu'on crée un produit avec plusieurs plis et des motifs dessus, précise Lucie Fresse, cheffe de produit et marketing. Puis, la feuille est découpée au format souhaité par le client, emballée dans des petits paquets qui continuent d'avancer, là sur la ligne de production que vous voyez, et qui sont ensuite emballés dans des cartons qui atterrissent enfin sur les palettes. » Voilà pour le processus qui donne aux briques alimentaires une deuxième vie.
Pour ce qui est des restes plastiques et aluminium issus des briques alimentaires usagées, ils sont envoyés chez des entreprises partenaires. Ces dernières ont deux options : soit elles brûlent ces restes pour produire de la chaleur dans des cimenteries, soit elles les retransforment en granulés plastiques afin de fabriquer des distributeurs de papier ou des meubles en plastique.
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Le «Village d'Eva», un refuge pour les exclus du système scolaire à Mayotte
7/1/2025
Dans le département 101, entre 5 000 et 9 000 enfants ne sont pas scolarisés. En cause, le manque de places dans les écoles face à la forte croissance de la population liée à l'immigration. Certaines communes chargées de la gestion des écoles sont accusées d’avoir recours à des pratiques discriminatoires pour favoriser la scolarisation d’enfants français, au détriment de ceux d’origine étrangère. Pour pallier ce vide éducatif, des associations accueillent des enfants non scolarisés.
De notre correspondante à Mayotte,
Lettres de l’alphabet, dessins accrochés sur les murs... Dans ce bâtiment, tout ressemble à une école. En réalité, ce sont les locaux du « Village d'Eva », une association qui accueille les enfants recalés du système scolaire. « On accueille des enfants qui ne sont pas scolarisés, explique Léonie Decourt-Gislard, l’une des responsables de l'association. Ils ont entre trois et seize ans, c'est l'âge auquel l'école est obligatoire. La majorité des enfants que l'on accompagne est de nationalité étrangère. Dans l'ensemble, ils sont originaires des Comores, des Grands Lacs ou de Madagascar... On a aussi évidemment des enfants de Mayotte. »
Depuis 2024, Aïcha, neuf ans, vient sur place trois jours par semaine. « Maintenant, je sais lire et écrire, affirme la petite fille. J'aime venir ici ! On voit nos amis, on joue... »
« Pour les enfants, arriver à l'école, c'est la vie qui commence »
Ces jeunes ne sont pas scolarisés par manque de places dans les établissements, un manque lié à la croissance démographique très dynamique dans l’archipel. En moyenne, le territoire comptait 24 naissances quotidiennes en 2024. Pour que tous les enfants soient scolarisés, il faudrait donc ouvrir une salle de classe chaque jour. Le rectorat estime qu’il manque 1 200 salles de classe sur le territoire.
Dans un rapport publié en juin, la Chambre régionale des comptes La Réunion-Mayotte souligne que faute de pouvoir accueillir chaque enfant, des maires « mettent en place des conditions d’inscription très discriminatoires ». C'est un phénomène que confirme l'anthropologue Alison Morano, qui mène des travaux sur les jeunesses de Mayotte depuis 2015 : « Au-delà du manque de place, ce qui coince l'inscription de beaucoup d'enfants, c'est l'exigence de documents non réglementaires à l'intention essentiellement de familles étrangères, surtout comoriennes ».
Contrairement à ce que la loi exige, beaucoup d’enfants ne sont pas non plus inscrits sur les listes d’attente. « La loi prévoit qu'un enfant doit être inscrit sur liste d'attente dès lors que son dossier est déposé par les parents. Ce n'est pas le cas à Mayotte. C'est pour cela que beaucoup d'enfants ne sont pas scolarisés. Leur situation est invisibilisée puisqu'ils ne sont pas inscrits sur une liste [officielle] », poursuit Alison Morano.
Pour les jeunes, « le Village d'Eva » est une passerelle vers l’école. Dès qu’une place se libère, ils rejoignent un établissement. Selon Léonie Decourt-Gislard, ils sont très motivés pour apprendre. « Ils savent pourquoi ils le font, et ils ont beaucoup d'énergie à mettre dedans, décrit-elle. C'est toujours une grande joie quand on annonce la scolarisation parce qu'ils ont compris ce qu'elle symbolise. Pour eux, arriver à l'école, c'est la vie qui commence ». Chaque année, l’association « le Village d'Eva » accompagne 800 élèves.
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Ces descendants d'immigrés refusent d'envoyer de l'argent dans leur pays d'origine
6/26/2025
En 2021, l’ensemble des transferts effectués de la France vers les pays d’Afrique, selon la Banque mondiale, a atteint un montant de près de 9 milliards de dollars. Un revenu vital pour de nombreuses familles africaines. Pourtant, des descendants d'immigrés de deuxième ou troisième génération refusent de donner. Et ils seraient de plus en plus nombreux, selon les observations des experts, bien qu'aucune étude sérieuse n'ait été produite sur le sujet.
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Faire parler les échantillons de drogue: le laboratoire de l'IRCGN
6/25/2025
Dernier épisode de notre série sur la drogue en France à l’occasion de la remise ce jeudi 26 juin du rapport de l’agence des Nations unies chargée de la lutte contre la drogue et la criminalité. Aujourd’hui : comment faire parler un échantillon de cocaïne ? Au sein de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN), le département Toxicologie analyse les échantillons transmis par enquêteurs et magistrats pour y rechercher et identifier les stupéfiants. Laura Martel a rencontré ces experts, capables de dresser une sorte de « profil » de la cocaïne qui permet de faire des rapprochements utiles aux investigations.
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France: la prise de drogue régulière fait peser un risque grave sur la santé des consommateurs
6/24/2025
Le 26 juin 2025, l'agence des Nations unies chargée de la lutte contre la drogue et la criminalité (ONUDC) publiera son rapport annuel sur les drogues dans le monde. Toute la semaine, nous vous proposons une série de reportages en France où, comme partout, la consommation de stupéfiants est en hausse constante. Aujourd'hui, nous abordons le volet santé. Injecter, fumer, sniffer, inhaler ou ingérer sont autant de manières de consommer les drogues avec des risques graves pour la santé : maladies respiratoires et cardiaques, risques neurologiques, transmission de virus, overdose. Contrairement aux idées reçues, arrêter une drogue n'est pas une question de volonté.
Assis sur un banc, Olivier rejette la fumée d'une cigarette, il consomme de la cocaïne et revient sur les effets de cette drogue psycho active. « Vous avez une montée. Et en cinq minutes, vous avez la descente. Après, le cerveau réclame », témoigne-t-il. Alors pourquoi le cerveau réclame ? « Il y a des régions cérébrales qui vont être sollicitées quand il y a un stimulus positif. Il y a un circuit de la récompense qui va s'exprimer au niveau du cerveau par une libération excessive de dopamine qui va entretenir cette sensation de plaisir, qui va faire qu'on va y retourner. », détaille le docteur Élisabeth Avril, qui soigne les toxicomanes depuis 30 ans.
Toutes les drogues sont addictives avec des effets très graves sur la santé. Mais en cas de manque, les symptômes ne sont pas les mêmes selon les produits. L'héroïne, par exemple, fait partie de la famille des opiacées et ses symptômes sont très douloureux pour le consommateur en sevrage. « Quand on a une dépendance, il va y avoir un manque et ce manque va se manifester par des symptômes physiques très violents. Il y a une recherche vitale en fait pour la personne de calmer ses douleurs, ses diarrhées. C'est très bruyant en fait comme manque. »
« Notre vie ne tient plus qu'à un gramme d'héroïne. On se met à contrôler toutes nos prises, à regarder l'heure parce que sinon je n'en aurai pas le lendemain », abonde Dylan, 29 ans, rencontré dans un centre d'aide aux toxicomanes. Il n'existe pas de produits de substitution à la cocaïne, mais la méthadone est proposée pour le sevrage à l'héroïne. « C'est un médicament qui est un opiacé également et que l'on va pouvoir proposer à des gens qui sont dépendants aux opiacés, pas aux autres drogues », explique le docteur Avril.
On entend souvent des riverains en colère qui ne supportent plus la présence dans leur quartier des usagers de crack, ce dérivé fumable de la cocaïne qui fait des ravages. Ils demandent à ce que l'on enferme les gens pour un sevrage forcé, une aberration pour le docteur Avril. « On sait que les pays qui pratiquent le sevrage forcé, que ce soit le Vietnam, la Russie, l'Iran, n'ont pas de meilleurs résultats que nous », argumente-t-elle.
Se défaire d'une addiction est très difficile et ce n'est pas une question de volonté, mais certains y arrivent. « Il y a des gens, malgré tout, qui arrivent à arrêter complètement. J'ai des patients maintenant, cela fait 30 ans qu'ils ont pu arrêter, pendant dix ans. Et puis à l'occasion de tel événement, ils ont repris. Et après, ils ont arrêté de nouveau. Vous voyez, la vie n'est linéaire pour personne », raconte Élisabeth Avril. Faute de pouvoir arrêter complètement, l'essentiel pour le docteur est que les toxicomanes soient exposés au moindre risque.
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À Marseille, le quotidien rude des habitants des quartiers nord, pris en étau entre narcotrafiquants et police
6/23/2025
Second volet d'une série de reportages sur le trafic et la consommation de stupéfiants en France, en hausse constante. Une situation dont pâtissent aussi les riverains des villes concernées. À Marseille, certains quartiers vivent sous la pression permanente des réseaux de trafic, de la pression policière et des pressions sociales. Comment fait-on face quand la violence s'invite jusque dans les halls d'immeubles ou à la sortie de l'école ? Rencontre avec ces habitants qui vivent cette réalité au quotidien, entre peur, colère et sentiment d’abandon.
Dans ce quartier au nord de Marseille, dans le sud de la France, le point de deal vient d'ouvrir. Les cris des guetteurs résonnent toute la journée sous les fenêtres de Nadia. Mais il y a deux ans, le trafic a fait une irruption beaucoup plus violente dans sa vie. À l'époque, son fils travaille une journée pour le trafic. Elle l'empêche d'y retourner. C'est elle et son mari qui en paient les frais, passés à tabac dans leur hall. « Six, sept sur une personne. Du sang et tout. Parce qu'elle voulait récupérer mon fils. Il avait 11 ans. J'ai porté plainte, mais ils n'ont rien fait », se remémore-t-elle. Depuis, Nadia est souvent contrainte de laisser son appartement aux trafiquants. « Même maintenant, ils viennent, ils me disent ''Laisse ta porte ouverte''. Je ne peux pas dire non. C'est Chicago, ici », se désole-t-elle.
À la sortie de l'école, à quelques dizaines de mètres du quartier, un groupe de mamans raconte aussi leur sentiment d'impuissance face au trafic. Dalie est éboueuse, et c'est la nuit qu'elle a le plus peur. « C'est lourd. Je me lève à 4h du matin, je sors en pleine nuit, je ne sais pas ce qui va m'arriver. Mais après, ça fait 50 ans, j'ai fait toute ma scolarité. La plupart des jeunes, je les ai vus grandir et je vois que la société, elle ne leur donne aucune chance. Je trouve que c'est injuste, ils en ont besoin ces jeunes », regrette-t-elle.
Une injustice pour ces jeunes, mais aussi pour les habitants du quartier qui se sentent pris en étau entre les opérations de police et le deal. « La problématique, c'est que quand la police vient dans le quartier... Je comprends qu'elle fait son boulot, mais c'est toujours à la sortie de l'école. On se fait gazer, les enfants sont en plein milieu et ce n'est pas facile psychologiquement », explique Malika. « On se retrouve en otage entre les deux, avec les jeunes et les policiers. Il y a des contrôles assez dur avec les jeunes, et même avec les adultes. Au lieu de se sentir soutenus, on se sent comme si on était coupables, nous aussi », abonde Miriam.
Comme la plupart des habitants interrogés, ces mères de familles ne voient pas de solutions réelles au trafic de drogue, ou aux conditions dans lesquelles elles vivent. Pour elles, seule solution : trouver un autre appartement. Une tâche compliquée, alors que les prix des loyers dans le privé sont en constante augmentation.
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En France, l'explosion de la consommation de stupéfiants touche toutes les catégories de population
6/22/2025
Premier épisode d'une série de reportages sur la drogue en France où, comme partout ailleurs, le trafic et la consommation de stupéfiants – notamment de cocaïne – est en hausse constante. Longtemps cantonnés aux mégapoles et aux banlieues urbaines, les réseaux de trafic de stupéfiants ont gagné les villes plus petites et la campagne française. La demande en cocaïne n'a jamais été aussi forte, notamment chez les jeunes adultes. RFI a recueilli les témoignages de consommateurs. Chacun à leur manière, ils racontent leur addiction.
Certains matins, Olivier, Parisien de 45 ans, prend un rail de cocaïne avant d'aller travailler dans la restauration. Il dit gérer sa consommation et revient sur les effets de la cocaïne. « Vous avez une montée et en cinq minutes, vous avez la descente. Après, le cerveau réclame. Ce n'est pas physique, c'est psychologique. À long terme, si on en prend beaucoup, on peut être dépressif. Moi, personnellement, non, parce que je sais m'arrêter », estime-t-il. Comme 40 % des consommateurs de poudre blanche, Olivier se fait livrer à domicile grâce aux réseaux sociaux.
Ce n'est pas le cas de Pierre. Il vit de petits boulots et s'approvisionne auprès d'un dealer à l'ancienne, comme il dit. Cet habitant de Châteauroux, ville moyenne située au centre de la France, raconte son parcours de toxicomane : « C'est mon père qui m'a mis dedans. Mon père était déjà dans la rue. Ma première bière, c'est lui qui me l'a payée. J'étais petit, j'avais 7-8 ans, un truc comme cela. Puis, le premier joint que j'ai fumé, la première fois, c'était avec lui aussi. J'ai commencé à 14 ans la fumette. Avec le temps, j'ai consommé d'autres drogues, d'autres trucs. »
Âgé de 36 ans, Pierre est polytoxicomane, c'est-à-dire qu'il consomme plusieurs drogues en même temps. Il regrette que les usagers de stupéfiants soient stigmatisés. « Tout le monde consomme de la drogue par rapport à un trauma qu'il a subi. Le problème, ce n'est pas la consommation, mais c'est ce qui vient avant. C'est ce qui vient déclencher ce besoin de consommation pour combler quelque chose. Ce n'est pas forcément des gens qui sont bêtes, c'est juste d'être faible à un moment de sa vie. On pense que c'est une béquille, et en fait, on tombe dans un piège », explique-t-il.
Axel, lui, est un rescapé de l'héroïne. Le jeune homme, paralysé de toute la partie gauche du corps, allume une cigarette et revient sur l'effet de l'héroïne, le fameux flash. « Au moment où l'on s'injecte le produit, on sent que c'est fort. On sent le produit à l'intérieur du corps », se remémore-t-il. Aujourd'hui, Axel ne consomme plus que du cannabis et se souvient de l'enfer de l'héroïne qui l'a amené à des comportements extrêmes, jusqu'à voler ses proches : « L'héroïne, c'est ce qui te met vraiment au plus bas. Le problème, c'est que ça te pousse à demander de l'argent ou des choses comme cela. C'est plus fort que toi. Le problème, c'est que tu es tellement à terre que tu es limite à tout casser. Je pense que c'est une des pires drogues. »
Même constat chez Dylan, 29 ans, rencontré dans un centre d'aide aux toxicomanes. « Notre vie ne tient plus qu'à un gramme d'héroïne. On se met à contrôler toutes nos prises, à regarder l'heure, se dire "Je sais qu'il faut que je prenne tant par jour parce que sinon je n'aurai pas le lendemain". Et si on n'en a pas, c'est un vrai manque, un sevrage. On a l'impression d'avoir la grippe, mais vachement plus fort », se rappelle-t-il.
D'après l'Observatoire français des drogues, les consommateurs de substances illicites n'appartiennent pas à un groupe clairement identifié. Ils peuvent être des usagers socialement insérés, tout comme des usagers précarisés ou marginalisés.
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À Paris, la vasque olympique prépare son grand retour
6/19/2025
La vasque olympique, qui a illuminé les Jeux l'année dernière, est de retour à Paris, dans le célèbre jardin des Tuileries, en plein cœur de la capitale. Si la météo le permet, elle s’allumera ce samedi 21 juin et tous les soirs jusqu’au 14 septembre prochain. Une opération qui se répétera tous les ans jusqu’aux JO de Los Angeles en 2028.
Fin de journée dans le jardin des Tuileries où chacun profite des plus belles couleurs du soleil. La vasque et le ballon gonflé à l’hélium sont installés depuis quelques jours déjà. Louise immortalise la scène avec son téléphone. « On en garde tous un très bon souvenir ! C’est un monument à part entière que l’on vient visiter à Paris désormais, donc je suis très contente de son retour ! », s’exclame la jeune femme.
Un retour loin d’être une évidence sur le papier. La tradition veut, en effet, que le feu olympique soit éteint jusqu’au début des jeux suivants. « Il fallait que l’on pose deux questions au Comité international olympique (CIO), explique Mathieu Lehanneur, le concepteur de la vasque. Peut-on garder la flamme ? Si on la garde, doit-on changer sa couleur ? Le CIO a répondu favorablement pour la garder telle qu’elle était », savoure-t-il.
Une flamme identique, une vasque de même dimension, un ballon neuf mais similaire à celui de l’an dernier... la seule différence notable, c’est la structure globale, beaucoup plus résistante. « C’est la même carrosserie avec un nouveau moteur, explique encore Mathieu Lehanneur. On passe d’une exposition de trois semaines l’année dernière pendant les Jeux olympiques et paralympiques, à neuf mois cumulés sur les trois prochaines années. Donc il fallait totalement fiabiliser le système. »
Une vasque allumée pour la première fois depuis un an
Le système, nous le découvrons justement. Jérôme Giacomoni, cofondateur de la société Aerophile qui a conçu le ballon, nous conduit au cœur de la machine, sous la vasque olympique, dans un dédale d'armatures. « Ici, vous avez le treuil, pointe-t-il. Ce treuil permet de freiner le ballon lorsqu’il monte et de le tirer lorsqu’il descend. Là, vous avez le moteur électrique qui agit à la façon d’une pompe, qui lui-même actionne des valves, qui elles-mêmes mettent de l’huile sous pression et font tourner le treuil. On est dans une petite usine ! »
Ce soir-là, la météo est idéale pour mener les tests de levage. « Il faut s’assurer que l’éclairage est à sa puissance maximale et que le treuil se déroule correctement jusqu’à la hauteur maximale de 60 mètres », souligne Jérôme Giacomoni. « C’est bon, on peut allumer », confirme l’un des ouvriers du chantier au talkie-walkie.
Il est 1h du matin, Paris dort lorsque la vasque se réveille pour la première fois depuis un an et s’élève sous les yeux de son créateur, Mathieu Lehanneur : « C’est très émouvant parce que ça fait presque un an qu’on ne l’a pas vu vivre ! Et ce cadre avec le jardin des Tuileries… Ça me fait et ça me fera toujours quelque chose… » Cette année, pas besoin de réservation : l’accès à la vasque sera libre et gratuit.
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«Se dire que les gens de banlieue sont importants» et à l'honneur dans une exposition «ça fait du bien»
6/18/2025
Les banlieues en France souffrent encore trop souvent d'une mauvaise image. Les tours, les barres, les violences urbaines. Le Musée national de l'histoire de l'immigration à Paris accueille l’exposition Banlieues chéries. Elle nous immerge au cœur de l'histoire des banlieues françaises pour justement dépasser les clichés. Avec plus de deux cents documents d’archives, peintures, photographies, design, installations, vidéos et témoignages, elle regarde avec tendresse et complicité la diversité des banlieues.
L'exposition Banlieues chéries au Musée de l'histoire et de l'immigration à Paris
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Vivre sous 50 degrés
6/17/2025
Des températures dépassant les 40 degrés... Si pour certains auditeurs de RFI, elles sont monnaie courante, en France, elles le sont moins. Et pourtant, selon les scientifiques, des températures de 50 degrés à l'ombre risquent de devenir monnaie courante d'ici à quelques décennies si nous ne luttons pas mieux contre le réchauffement climatique. Pour comprendre dans sa chair, pendant quelques minutes, ce que c'est que de vivre dans une telle chaleur, et entrevoir les risques pour les êtres humains, The Human Adaptation Institute a lancé une chambre climatique. Une pièce, à l'arrière d'un camion, dans laquelle il fait 50 degrés. On peut y faire toutes sortes d'activités de la vie courante. Elle parcourt la France pour sensibiliser la population et la pousser à agir pour éviter d'en arriver là. Reportage lors d'un passage de la chambre climatique à Marseille.
« Il fait très chaud, mais tant qu'on ne fait rien, franchement ça a l'air d'aller ». La chaleur ne semble pas insurmontable au premier abord à Martin Estivals, 26 ans, qui teste la chambre climatique. Il entame un premier exercice : marcher dix minutes sur un tapis électrique avec une allure normale, comme pour aller au travail, promener son chien, ou aller faire ses courses.
« Une activité juste du quotidien, pas particulièrement sportive. Pour l'instant, ça fait seulement deux minutes, ça va. Mais j'ai un peu l'impression que le cœur bat un peu plus vite alors que c'est seulement de la marche. La seconde activité qui nous est proposée, c'est des tests d'agilité, donc on va voir ce que cela va donner, si on y arrive ou pas ».
La tête chaude, un brin engourdi, il s'assied ensuite devant de petits jeux simples : il doit passer un anneau sur une tige en métal. « On doit faire passer un parcours sans toucher. Si on touche, il y a un bip ». Et très vite, il se rend compte de sa maladresse. A côté de lui, Emma Louise Robeyns, 21 ans, n'y arrive pas mieux : « Je ne sais pas si je pourrais passer 24h dans cette situation. Trente minutes, cela me paraît faisable. Mais c'est vrai qu'il fait chaud quand même ».
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Et plus les minutes passent, plus la chaleur l'affecte. Le dernier exercice, plus cérébral, est le plus difficile : « J'ai l'impression d'avoir plus de mal à réfléchir, à décrypter ce que l'on me dit, à lire. Je trouve ça compliqué de se concentrer, c'est le genre de moment où on se recentre sur nos capacités vitales et le reste, on oublie un petit peu. J'ai très chaud, je colle, ce n'est pas très agréable. Je crois qu'on peut sortir, non ? Cela va faire du bien ».
Même l'eau, servie à température ambiante, ne rafraîchit pas. On dirait du thé. Après une demi-heure dans la chambre climatique, les deux cobayes s'en tirent avec un peu de fièvre, pas mal de transpiration, quelques vertiges et des maux de tête. Une expérience qui vise à leur faire pendre conscience de l'urgence à diminuer notre impact sur le climat mondial.
Christian Clot, l'explorateur spécialiste de l'adaptation humaine, est à l'origine de cette chambre à 50 degrés : « Ça durera quelques heures, quelques jours, puis cela retombera. Puis, petit à petit, si on n'arrive toujours pas à réduire la température mondiale, alors cela durera plusieurs semaines de suite. C'est ce que l'on doit absolument éviter ».
Malheureusement, on pourrait avoir ce genre de température en France à partir des années 2050, 2060. Diminuer nos émissions de gaz à effet de serre est vital : les décès liés à la chaleur augmentent d'année en année. 500 000 personnes en sont mortes en 2023, selon un rapport du Lancet, le journal médical de référence.
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Cimetière harki de Rivesaltes: plainte contre X pour recel de cadavres
6/16/2025
L'histoire des harkis, ces musulmans qui ont combattu auprès de l'armée française pendant la guerre d'Algérie, reste un épisode douloureux pour la communauté. Une histoire aujourd'hui ravivée par l'affaire des tombes disparues. Au sortir de la guerre, menacés de mort chez eux, quelque 90 000 harkis et leurs familles sont accueillis en France. Un peu plus de 20 000 sont relégués au camp de Rivesaltes, dans le sud du pays, aussi appelé camp Joffre. Entre 1962 et 1965, près de 150 personnes y sont décédées et enterrées sur place, dans un cimetière de fortune. En 2024, des fouilles mettent au jour des tombes, mais elles sont vides. La municipalité a reconnu avoir déplacé les sépultures en 1986 sans prévenir les familles. Cinq d'entre elles ont porté plainte.
« Entre l'été 1962 et l'automne 1964, le camp enregistre plus de 140 décès, essentiellement des bébés de moins de deux ans et des personnes âgées ». Naïma Gimenez lit la légende d'une des photos exposées au mémorial du camp de Rivesaltes. Cette fille de harki fait partie du collectif qui a déposé une plainte contre X après avoir appris, en février dernier, que les tombes du camp Joffre ont été déplacées à l'insu des familles : « Ça a été fait un petit peu à la va-vite, sans nous demander surtout l'accord à nos parents. Aucun courrier, qui reflète quoi que ce soit sur cette histoire. J'ai tout su en 2019, quand il y a eu l'inauguration de la stèle de ces enfants décédés au camp de Joffre ».
Nicole Gougache fait partie, elle aussi, des plaignants. Devant une photo montrant des tentes dans lesquelles ont vécu des harkis, elle évoque la mort de sa grande sœur Aziza : « On se demande combien de familles il y avait dans ces tentes. En tout cas, ça me rappelle que ma maman a accouché dans le camp de Rivesaltes et l'enfant qui avait quelques jours a vécu dans ces tentes. La neige passait à travers et ma sœur est décédée dans le camp en mars 1963 ».
Et quand Nicole Gougache et sa famille apprennent que les restes de sa sœur ne sont plus dans le camp de Rivesaltes depuis 1986, elle et sa famille se sont senties trahies : « Encore une fois, on nous cache les choses. On est quand même en 1986, on n'est pas en 1963, je dis bien 1986. On pouvait nous informer puisque le registre des naissances était bien à la mairie de Rivesaltes, avec les décès. Dans notre livre de famille, il est bien écrit "Aziza, née le 27 mars, décédée le 29 mars 1963", donc on pouvait nous informer. Pourquoi cela n'a pas été fait et qui est à l'origine de tout cela ? ».
Pour avoir des réponses, cinq familles ont déposé plainte. Maître Antoine Ory, du barreau de Paris, est leur avocat : « Effectivement, elles considèrent que les réponses qui leur sont apportées ne sont pas satisfaisantes. Elles ont besoin de comprendre pourquoi tout ça a été fait dans ces conditions. Je rappelle quand même que cet épisode assez regrettable, et même macabre, a été découvert de manière fortuite. Il se pose la question de pour quelle raison tout ça a été fait dans leur dos, et pourquoi ils ont appris cet épisode fortuitement ? ».
En attendant une réponse de la justice, les milliers d'ossements de harkis restants et retrouvés dans des cartons au cimetière de Rivesaltes, sont en cours d'analyse dans un laboratoire de Marseille. André Bascou, maire de Rivesaltes, qui avait signé en 1986 les documents de transfert des tombes, est toujours en poste. Sollicité par RFI, il n'a pas souhaité s'exprimer sur ce sujet.
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Entre douleur et espoir: le nouveau départ de musiciens de Gaza réfugiés à Angers
6/15/2025
À Gaza, il y a ceux qui restent enfermés dans l'enclave palestinienne assiégée par l'armée israélienne. Et ceux qui ont pu fuir. C'est le cas de cinq familles de musiciens arrivés en France en début d'année. Des hommes, des femmes et leurs enfants qui ont trouvé refuge à Angers, dans l'ouest du pays. Tous les hommes font partie du même groupe de musique. Rencontre avec deux d'entre eux.
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À La Réunion, le Cross surveille un trafic maritime représentant 25% du commerce mondial
6/12/2025
L'océan Indien abrite l'une des plus importantes routes du commerce mondial, reliant les producteurs de pétrole du Moyen-Orient aux marchés en Asie, en Europe, et au-delà. Un espace gigantesque de plus de 70 millions de m2 qui représente 25% du commerce mondial et où le passage des navires est étroitement surveillé. L'île française de La Réunion se situe à un endroit stratégique dans la région. Reportage au Centre régional opérationnel de surveillance et sauvetage (Cross) de la région Sud Océan Indien.
Sur les écrans radars, une vaste étendue de mer à surveiller, celle des zones économiques exclusives de la France dans le sud de l'océan Indien, soit 5,6 millions de kilomètres carrés. À la passerelle, le centre opérationnel du Cross Sud Océan Indien, les équipes sont sur le pont 24h sur 24 pour tenter d'identifier les éventuelles avaries en mer.
« Notre rôle, c'est de détecter des situations à risques qui concernent le trafic en général et plus spécifiquement le trafic commercial. Détecter pour éviter des scénarios d'échouement de collision entre deux navires. Concernant les pollutions, essayer de les détecter et d'identifier les navires responsables et de pouvoir les poursuivre. Détecter des navires qui seraient stoppés, qui ralentirait ou qui auraient des routes erratiques. L'idée, c'est d'interroger les navires, essayer de prendre contact avec eux par tout moyen pour savoir ce qui se passe à bord », explique Alice Gaillard, la directrice adjointe du Cross Sud Océan Indien, situé sur l'île de La Réunion.
Chaque année, 20 000 navires passent par l'océan Indien, un trafic qui s'est accru ces dernières années. « Il faut savoir que le trafic s'intensifie depuis la crise des attaques de Houthis au Yémen. Aujourd'hui, les plus gros porte-conteneurs ne passent plus par le canal de Suez. Tous les équilibres géostratégiques impactent les routes maritimes. On a un report du trafic sur la route qui passe par le cap de Bonne-Espérance, avec une augmentation significative à environ 20 à 30% d'augmentation sur cette route. Cela veut dire plus de travail de surveillance et de vigilance de la part du Cross », explique-t-elle.
Sur Maurice, l'Association des États riverains de l'océan Indien travaille sur la coopération entre les différents acteurs de la zone pour renforcer la surveillance des navires et protéger la biodiversité. « L'outre-mer français constitue la plus grande zone économique exclusive de la France, constitue plus de 90% de la biodiversité marine de la France. En termes de contestation, malheureusement, dans l'océan Indien, c'est constant. Étant donné qu'il y a autant d'États et autant d'îles, les limites des zones économiques exclusives, même si c'est fixé par le droit international de la mer, il y a toujours cette question de qui a la capacité d'intervenir. Dans le fond, cette population, c'est une population qui est liée historiquement et culturellement, c'est une population qui veut du vivre ensemble et qui veut pouvoir évoluer sur le long terme dans un environnement sain », estime Mélyne Tarer, experte technique internationale au sein de l'IORA. En plus du trafic maritime, l'Indianocéanie est l'un des 34 points chauds de la biodiversité mondiale et la troisième région du monde la plus à risque face aux effets du dérèglement climatique.
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Menacé par l'océan Atlantique, le phare de la Courbe vit ses dernières années
6/11/2025
En France, l’érosion du littoral menace aussi le patrimoine maritime. C'est le cas du phare de la Coubre, sur la façade atlantique, qui doit être déconstruit dans les prochaines années. Sur place, les responsables du site et les habitants réfléchissent déjà à la façon de garder une trace de ce monument emblématique de leur région.
Gravir les 300 marches en colimaçon du phare de la Coubre, en France, c’est le prix à payer pour profiter d’un panorama exceptionnel. À 64 mètres du sol, le plus haut phare de la côte charentaise offre une vue imprenable sur la plage, les dunes, la forêt domaniale de la Coubre et ses étendues de pins. Impossible, évidemment, de rater l’océan Atlantique. Il est bien là.
« Progressivement, il avance, il avance », commente Damien Joussemet. Le responsable du phare de la Coubre connaît les chiffres par cœur. Ils sont implacables. En 1905, année de la construction du phare, l’océan était à deux kilomètres. Cent-vingt-cinq ans plus tard, le voici à 150 mètres. Inexorablement, le trait de côte recul et la pression s’accentue sur l’édifice. « Plus l’océan se rapproche, plus il y a un risque d’infiltration d’eau sous la structure. Puisqu’il n’est pas construit sur de la roche, mais sur du sable, sa stabilité est menacée », explique Damien Joussemet.
Aucune date n’est arrêtée, mais l’État va bel et bien le déconstruire dans les années à venir. Déconstruire et non démolir. Le détail a son importance pour cet édifice inscrit aux monuments historiques depuis 2011. « L’objectif est de récupérer des éléments qu’il faut absolument garder et conserver pour les valoriser, mais aussi pour les présenter aux générations qui ont connu le phare actuel et celles qui ne l’ont pas connu parce qu'on a vraiment des pépites du patrimoine », souligne Damien Joussemet. Parmi les trésors à conserver, l’escalier métallique en colimaçon réalisé dans les ateliers d’un certain Gustave Eiffel, la coupole, la lourde lanterne et la lentille de Fresnel.
« Dans notre culture marine, ces bâtiments ont une âme »
Les équipes du phare préparent donc déjà son testament. Son devenir est encore au stade de la réflexion, mais Damien Joussemet imagine déjà qu'un musée pourrait accueillir certaines pièces de l’édifice : « Il pourrait y avoir une partie mémorielle et une partie du musée où l’on fait intervenir les nouvelles technologies pour pouvoir présenter des choses que l’on ne pourra plus voir dans de nombreuses années, notamment le panorama actuel. Il y aura un après-phare qui aura peut-être une forme totalement différente, mais qui sera aussi un symbole du territoire dont on sera très fier. »
La disparition annoncée de cette silhouette rouge et blanche attriste certains habitants. « Dans notre culture marine, ces bâtiments ont une âme. Ici, on aime nos phares, et on aime celui de la Coubre », confie Raphaël Descamps. Adepte de chants marins, il a écrit une chanson pour lui rendre hommage. Une façon de participer, à son échelle, à l’héritage du phare de la Coubre.
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Au théâtre des Champs-Élysées, l'«Élixir d'amour» fait danser des déficients intellectuels
6/10/2025
Pendant un an, un projet unique a réuni des éducateurs et des personnes en situation de handicap intellectuel autour de l’opéra L’Élixir d’amour de Donizetti. Ce mercredi soir, les danseurs qui montent sur la scène du Théâtre des Champs-Élysées sont des déficients intellectuels. Ils prouvent que le handicap n’est pas un frein à l’expression artistique.
De l'élixir d'amour, ses danseurs n'en ont pas besoin pour tomber amoureux. Tous habillés d'une veste de travail bleu et d'un pantalon noir, Alice, Mounir, Emma, Kevin, Yaya et les autres forment une ronde en se donnant la main et sont prêts pour la répétition. « Moi, je n'ai jamais fait de danse. C'est mon moment préféré », confie l'un d'entre eux.
Les voilà qui s'avancent au centre de la ronde, puis s'en éloignent, sous la direction de Juliette Clerc, danse-thérapeute, qui salue les progrès des dix danseurs, déficients intellectuels et très impliqués. « Je suis émue de voir, entre septembre et maintenant, l'évolution des uns et des autres. Ce lien qui s'est créé entre eux. Il y a vraiment quelque chose de très fort. Une vraie amitié, je pourrais l'appeler comme ça, même si on est dans des lieux de thérapie », raconte-t-elle. « J'adore mes amis », abonde une jeune fille.
Cheveux longs jusqu'en bas du dos, Miona assiste Juliette Clerc. Elle se réjouit de ce projet qui intègre les gens différents. « Cela donne de la visibilité. Cela montre que la danse peut être pratiquée pour tous et par tous. C'est quelque chose qui me touche profondément. J'adore ce projet. Il y a beaucoup d'humanité. De beaux progrès aussi de la part de chacun. Je ne sais pas si vous étiez là, par exemple, pour le travail de la ligne, mais mine de rien, c'est un travail. Cela l'air de rien comme cela, mais on est parti de loin. C'est un gros travail de synchronisation en groupe qui n'est pas toujours évident pour tous. C'est vraiment apprendre à être soi, mais avec l'autre aussi », explique-t-elle.
Les danseurs aiment leur éducatrice et Christine aime sa petite troupe. « On est très vivant. On est beaucoup dans la joie aussi. Notre gaieté parfois est communicative et laisse des sourires sur les visages des gens. Et ça, c'est pas mal », s'enthousiasme Christine Rousseau, pour qui cette collaboration avec le Théâtre des Champs-Élysées est réjouissante. « Très souvent, que ce soit pour les événements, les fêtes, les réunions, on se retrouve dans des lieux qui sont un peu moches, avec du carrelage au sol, dans les salles des fêtes un peu anonymes, un peu vilaine. J'adore les faire venir dans des beaux lieux. Le Théâtre des Champs-Élysées, avouez que ce n'est pas vilain », s'amuse-t-elle.
Pour le final de cette restitution de l'Élixir d'amour, qui se termine par le mariage de Nemorino et d'Adina, Mounir est en costume et dans les cheveux d'Alice se trouve une belle couronne de fleurs. « On s'aperçoit que cela revient dans presque toutes leurs poésies. Tous les jours, il y a des "je t'aime", il y a des regards, il y a des rêves », s'émerveille Christine. La concentration se lit sur ses sourcils froncés. Anissia a lancé des cris de joie pendant le mariage. C'est sur cette célébration de l'amour, et à regret, que nous quittons cette joyeuse équipe.
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Océans: à Boulogne-Sur-Mer, l'aire marine protégée n'est pas respectée
6/9/2025
La France accueille cette semaine la troisième Conférence des nations unies sur l’océan, à Nice. Le pays a une grande responsabilité dans la protection des mers : grâce à ses territoires d’Outre-mer, il compte la deuxième plus grande zone économique exclusive, après les États-Unis. Le gouvernement se targue d’être un modèle en la matière, et soutient que plus de 30% de ses eaux sont protégées. Or, dans la pratique, cela est loin d’être le cas. Sébastien Farcis est parti en reportage dans la région des Hauts-de-France, au bord de la Manche, où d’énormes chalutiers pêchent sans limites dans les aires marines protégées françaises.
De notre envoyé spécial à Boulogne-Sur-Mer
Laetitia Bisiaux avance sur le quai de Boulogne-Sur-Mer, le plus important port de pêche de France. Et grâce à une application de téléphone, cette spécialiste de l’association environnementale Bloom, identifie les chalutiers présents au large. Y compris ceux qui ne devraient pas être là.
« Le Zeeland qui mesure 115 mètres, qui est dans l'aire marine, protégée des Bancs des Flandres. Vous avez aussi un bateau qui s'appelle l'Africa, qui mesure 126 mètres avec une vitesse assez faible. Ce n'est pas du transit, c'est vraiment de la pêche. Donc, rien que l'aire marine protégée des ports de Flandre, on peut compter le nombre de points bleus qui sont une quinzaine dans une toute petite zone qui est censée être protégée pour l'habitat. Et on a des navires de pêche qui pêchent vraiment le fond, qui sont conçus pour racler le fond marin. »
Cette région des Hauts-de-France compte trois aires marines protégées. En tout cas sur le papier. Car beaucoup de pêcheurs, eux, n’en connaissent pas l’existence, à l’instar de Pierre Leprêtre, il est propriétaire du chalutier Le Marmouset III. Et il est en train de débarquer une cargaison de deux tonnes d’encornet et de merlan. « Et en face de Calais, dans les eaux anglaises, les Anglais ont mis une grande aire marine protégée et là, on ne peut plus aller dedans. Normalement, il y a du poisson. » Et du côté français, il n'y a d'aires marines protégées : « Il n'y en a pas encore. Après, c'est en pourparlers, mais bon... »
Raréfaction du poisson
L’association Bloom a calculé qu’en 2023, les navires de plus de 15 mètres ont pêché autant à l’intérieur des aires marines protégées françaises qu’en dehors. Un paradoxe. Dans les Hauts-de-France, certaines techniques destructrices, comme la senne démersale, qui déploie des filets de 2 km², empirent la situation. Et ceci achève les pêcheurs artisanaux plus respectueux de cette faune marine, comme Laurent Merlin. « Il n'y a plus rien le long de nos côtes, tout est rasé, on ne pêche plus un poisson. Et du coup, pour pêcher un peu de sole, on doit partir loin. Et là, c'est de pire en pire. Regardez, j'ai deux collègues, ils ont fait 37 000 de route aller pour pêcher un peu de sole. Ils n'avaient même pas 100 kilos avec la marée de face, ils ont mis 5 heures pour y aller, alors qu'avant, on mettait une demi-heure, 1 heure, on sortait, on pêchait la sole quoi. »
Le Comité régional des pêches affirme avoir fait installer des rondelles en caoutchouc sur les filets pour réduire l’impact sur les fonds marins de ces zones. Mais le résultat de cette technique n’a pas été mesuré, et selon les standards internationaux, elle demeure incompatible avec la protection d’une aire marine.
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À Marseille, les champs de posidonie méditerranéens
6/8/2025
Pour cette spéciale Océan, RFI vous emmène à Marseille, où en mai dernier, la mairie a entrepris des travaux sur plusieurs de ses plages afin d'y réimplanter de la posidonie. La posidonie, surnommée « poumon de la mer », est un véritable puits de carbone. Nurserie pour poissons, elle permet de protéger nos plages de l’érosion... Bien que la posidonie soit une plante protégée depuis 1988, il était d'usage pendant de nombreuses années de retirer les banquettes de posidonies mortes des plages. Un reportage de Siam Spencer.
À Marseille, sur plusieurs plages du centre-ville, des amas de feuilles brunes s’accumulent entre les vagues et le sable… « Nous sommes sur la plage des Prophètes, qui est une petite plage sur la Corniche à Marseille, explique Hervé Manchon, adjoint à la biodiversité marine, à la mer et au littoral de la mairie de Marseille. Ce que nous voyons à nos pieds, ce sont des banquettes de posidonies, c’est-à-dire le dépôt des feuilles mortes des herbiers de posidonies, qui commence à s’accumuler sur le trait de côte et qui vient protéger le sable de l’érosion ».
Il y a eu des travaux au mois de mai, raconte Hervé Manchon : « Durant l’hiver, se sont accumulées beaucoup plus de quantités d’herbes mortes de posidonies et ça formait des banquettes énormes sur le littoral… On a fait ce qu’on appelle un millefeuille de posidonies ».
Ces travaux pour créer des millefeuilles de posidonies, entrepris par la mairie de Marseille, ont des bénéfices multiples, puisque ces banquettes, en plus de protéger les plages de l’érosion, viennent aussi en se décomposant nourrir le phytoplancton dans la mer. Dans l’eau, on retrouve la posidonie vivante, sous forme de véritables prairies, d'herbes qui se balancent au gré des courants et abritent tout un écosystème. Comme l’explique Charles-François Boudouresque, professeur émérite à Aix-Marseille Université, et spécialiste de la posidonie : « L’herbier de posidonie est un écosystème extrêmement important en Méditerranée ».
Qu'est-ce qui menace la posidonie aujourd'hui ? Les chalutiers et la surpêche. Parmi les autres menaces citées par Charles François Boudouresque, sur l’ensemble de la Méditerranée : les aménagements littoraux et la pollution.
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La Pride des Banlieues: pour ceux qui veulent sortir du silence
6/5/2025
En France et dans le monde entier, le mois de juin, est celui des Fiertés. Un mois de célébration et de luttes pour les personnes LGBTQ+. Dans chaque pays, des Gay Pride, les Marches des Fiertés sont ainsi organisées. C'est le cas en France, dans la ville de Saint-Denis avec, depuis 2019, la Pride des Banlieues. Son but : mettre en avant ces communautés des quartiers dits populaires dans lesquels se revendiquer LGBT est souvent plus difficile qu'ailleurs. Quelques jours avant le jour J, rencontre de bénévoles qui se préparent à la célébrer.
« On est la semaine avant la Pride et on est tous exténués. » La Pride des Banlieues approche. L'équipe de bénévoles se retrouvent sur la terrasse d'un café à Saint-Denis pour les derniers préparatifs. Il y a deux amies, Fadi et Asma, elles sont Magrébines, nées dans des familles musulmanes. L'une est bisexuelle, l'autre lesbienne. La Pride des Banlieues, c'est le premier lieu queer où elles se sentent bien. « La communauté queer reste un milieu très blanc et donc elle va être raciste ou avoir des biais racistes. On ne m'acceptait pas en tant que Maghrébine dans la communauté LGBT, on ne m'acceptait pas en tant que LGBTQ+ dans la communauté maghrébine. La Pride des Banlieues, je pense que c'est ça qui a servi, c'est de regrouper toutes ces personnes-là. » Fadi est de son avis : « Avec la Pride des Banlieues, tu arrives, tu n’as pas besoin de parler de ces sujets-là, on se comprend, sur la famille, sur la religion, sur le taff. »
Ici, pas besoin du masque qu'elle porte en famille. Les proches de Fadi ne savent rien de son homosexualité : « Je pense, c'est un peu de la psychose, mais pour moi le risque, c'est qu'on me chope, qu'on me marie de force parce que mes parents sont attachés aux coutumes, il faut se marier tôt, avoir des enfants tôt. Ils sont très croyants, ils sont capables de me dire " Tu repars au bled, et tu te maries avec un mec " ou, je ne sais pas, me faire tabasser, un truc comme ça. »
Asma et Fadi vivent toutes les deux en banlieue parisienne. Leur réalité n'a rien à voir avec celle des personnes LGBT qui habitent les grandes métropoles : « La manière d’aborder le sujet n’est pas le même, il y a trop de tabou. » D'où le besoin de créer une Pride qui les représente. Ce qui n'est malheureusement pas le cas de la Marche des fiertés de Paris,assure Tess, jeune queer, qui n'y participes plus : « C’est un festival, si son identité, c’est la vivre comme un festival, je comprends, mais il y a des personnes qui ont besoin d’autre chose et la Pride des Banlieues répond à ce besoin. »
Après la marche, le travail continue pour les trois bénévoles. Tess veut visibiliser les identités queers à travers une série de photo. Asma et Fadi, elles, réalisent leur propre documentaire sur la Pride des Banlieues.
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France: élan de solidarité avec les mineurs étrangers expulsés de la Gaîté Lyrique
6/4/2025
Expulsés de la Gaîté Lyrique le 18 mars dernier après quatre mois d'occupation, de nombreux mineurs isolés se sont retrouvés à la rue du jour au lendemain. C'est le cas d'une quinzaine d'élèves du lycée Jacques Decour, dans le centre de Paris. Grâce à la solidarité collective, tous ont pu être relogés.
Au tableau, Angélique Lemasson, professeure d'histoire-géographie. En face d'elle, six élèves de la classe pour étrangers du lycée Decour, à Paris. Certains sont des mineurs non accompagnés qui occupaient la Gaîté Lyrique. C'est le cas d'Alhassane. Après l'expulsion de mars, le mineur de 16 ans s'est retrouvé à la rue. « Quand tu dors dehors, tu ne peux rien faire. Tu cherches où aller manger, se laver. Cela va te prendre beaucoup de temps. Quand tu rentres dans le campement, tu n'as pas envie de réviser, t'as été ailleurs, tu ne peux rien faire », explique-t-il.
Une situation inadmissible pour le professeur en charge de la classe. C'est avec stupéfaction que Sylvan Lemaire a appris la situation d'une quinzaine de ses élèves. « Le jour de l'expulsion de la Gaîté Lyrique, un élève m'envoie très poliment un message pour me dire qu'il ne sera probablement pas en classe parce qu'ils sont encerclés par la police. C'est là que j'ai découvert qu'on avait un certain nombre d'élèves qui dormaient à la Gaîté Lyrique. Et qui, de ce fait-là, se retrouvaient à la rue à partir du moment où la Gaieté était expulsée », raconte-t-il.
Après quelques échanges de SMS, collègues et parents d'élèves se mobilisent. Une semaine plus tard, Alhassane est relogé. « Heureusement pour moi, le lycée, avec la solidarité des parents d'élèves, des enseignants, a pu trouver un studio avec mon amie », témoigne-t-il. Grâce à la naissance de l'association Decour, un élève, un toit, plus aucun élève n'est à la rue. Un élan de solidarité lancé par les enseignants et les parents d'élèves, comme cette mère d'un collégien. « C'est chacun, individuellement, qui a fait un geste, soit de proposer un hébergement, soit de contribuer à la cagnotte », salue-t-elle.
Une cagnotte qui s'élève désormais à près de 15 000 euros. Mais impossible de se dire satisfaits, car les solutions d'hébergement sont temporaires, regrette la professeure d'histoire-géographie, Angélique Lemasson : « Nous, ce qu'on voudrait, c'est que le rectorat rétablisse des solutions pérennes. On a des familles qui sont dans des structures très précaires. Nos élèves sont hébergés d'une manière temporaire, mais sont hébergés pour le moment. Le problème, c'est que ce n'est pas pérenne. On ne sait pas ce que cela va donner cet été, par exemple. » Et parmi les jeunes de la Gaîté Lyrique, nombreux sont encore à la rue. Une quinzaine sont des amis d'Alhassane. Les membres de l'association Decour essaient donc d'élargir la mobilisation à d'autres établissements de la capitale.
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